Marion Valette & Charles Bohbot – Avocats au sein du cabinet BJA
Qu’est-ce que la déspécialisation d’une partie commune spéciale ?
La déspécialisation a pour objet de transformer une partie commune spéciale en partie commune générale.
Rappel de la distinction entre partie commune générale et partie commune spéciale :
Sur ce point, il est rappelé que les parties communes générales sont celles qui sont affectées à l’usage ou à l’utilité de tous les copropriétaires. L’article 3 de la loi n°65-557 du 10 juillet 1965 dispose en effet :
« Sont communes les parties des bâtiments et des terrains affectées à l’usage ou à l’utilité de tous les copropriétaires ou de plusieurs d’entre eux.
Dans le silence ou la contradiction des titres, sont réputées parties communes :
– le sol, les cours, les parcs et jardins, les voies d’accès ;
– le gros œuvre des bâtiments, les éléments d’équipement commun, y compris les parties de canalisations y afférentes qui traversent des locaux privatifs ;
– les coffres, gaines et têtes de cheminées ;
– les locaux des services communs ;
– les passages et corridors ;
– tout élément incorporé dans les parties communes.
Sont réputés droits accessoires aux parties communes dans le silence ou la contradiction des titres :
– le droit de surélever un bâtiment affecté à l’usage commun ou comportant plusieurs locaux qui constituent des parties privatives différentes, ou d’en affouiller le sol ;
– le droit d’édifier des bâtiments nouveaux dans des cours, parcs ou jardins constituant des parties communes ;
– le droit d’affouiller de tels cours, parcs ou jardins ;
– le droit de mitoyenneté afférent aux parties communes ;
– le droit d’affichage sur les parties communes ;
– le droit de construire afférent aux parties communes. »
Les parties communes spéciales, créés par la loi n°2018-1021 du 23 novembre 2018 dite loi « ELAN », sont celles affectées à l’usage et à l’utilité de plusieurs copropriétaires. L’article 6-2 de la loi n°65-557 du 10 juillet 1965 dispose en effet :
« Les parties communes spéciales sont celles affectées à l’usage ou à l’utilité de plusieurs copropriétaires. Elles sont la propriété indivise de ces derniers.
La création de parties communes spéciales est indissociable de l’établissement de charges spéciales à chacune d’entre elles.
Les décisions afférentes aux seules parties communes spéciales peuvent être prises soit au cours d’une assemblée spéciale, soit au cours de l’assemblée générale de tous les copropriétaires. Seuls prennent part au vote les copropriétaires à l’usage ou à l’utilité desquels sont affectées ces parties communes. »
Il peut s’agir par exemple de water-closets situés au 1er étage d’un immeuble affectés à l’usage et à l’utilité des copropriétaires du 1er étage uniquement.
Dans quelle hypothèse une déspécialisation pourrait-elle intervenir ?
L’hypothèse pourrait être celle d’un copropriétaire qui souhaiterait par exemple renoncer à l’usage des water-closets situés au 1er étage de l’immeuble afin de ne plus être redevable des charges spéciales y afférentes. Ces water-closets deviendront alors des parties communes générales.
Cette déspécialisation d’une partie commune spéciale en partie commune générale aura pour conséquence que les copropriétaires, jusque-là non concernés par le paiement des charges y afférentes, devront désormais les payer.
A quelles conditions un copropriétaire peut-il renoncer à une partie commune spéciale ?
Dès lors que cette renonciation entrainera une modification dans l’usage d’une partie commune, au sens de l’article 26 b) de la loi n°65-557 du 10 juillet 1965, le principe de cette renonciation doit nécessairement faire l’objet d’un vote en assemblée générale des copropriétaires.
Etant précisé que conformément à l’article 6-2 précité, les décisions afférentes aux seules parties communes spéciales peuvent être prises soit au cours d’une assemblée spéciale, soit au cours de l’assemblée générale de tous les copropriétaires.
Dans cette hypothèse, seuls prennent part au vote les copropriétaires à l’usage ou à l’utilité desquels sont affectées ces parties communes.
La modification du Règlement de copropriété devra également être votée et ce, à la majorité de l’article 26 b) de la loi n°65-557 du 10 juillet 1965.
Enfin la renonciation d’un copropriétaire entrainera nécessairement une modification des charges. Cette modification devra être votée à l’unanimité des copropriétaires conformément à l’article 11 al.1 de la loi n°65-557 du 10 juillet 1965 lequel dispose :
« Sous réserve des dispositions de l’article 12 ci-dessous, la répartition des charges ne peut être modifiée qu’à l’unanimité des copropriétaires. Toutefois, lorsque des travaux ou des actes d’acquisition ou de disposition sont décidés par l’assemblée générale statuant à la majorité exigée par la loi, la modification de la répartition des charges ainsi rendue nécessaire peut être décidée par l’assemblée générale statuant à la même majorité.
En cas d’aliénation séparée d’une ou plusieurs fractions d’un lot, la répartition des charges entre ces fractions est, lorsqu’elle n’est pas fixée par le règlement de copropriété, soumise à l’approbation de l’assemblée générale statuant à la majorité prévue à l’article 24.
A défaut de décision de l’assemblée générale modifiant les bases de répartition des charges dans les cas prévus aux alinéas précédents, tout copropriétaire pourra saisir le tribunal judiciaire de la situation de l’immeuble à l’effet de faire procéder à la nouvelle répartition rendue nécessaire. »
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Recommandations du cabinet BJA :
Lorsqu’un copropriétaire émet le souhait de renoncer à une partie commune spéciale, il est recommandé au syndic de circulariser, en amont de l’assemblée générale appelée à se prononcer sur la déspécialisation, un document auprès de l’ensemble des copropriétaires de l’immeuble afin que ces derniers soient avertis d’un tel projet et puissent le cas échéant se positionner soit sur une substitution du droit auquel le copropriétaire renonce, soit sur une acquisition de cette partie commune spéciale.